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Article : [27] - La liste idéale (le bac de français des professeurs de français)


mercredi 24 avril 2002

Par Luc Blanvillain

Il s’agissait de savoir sur quels extraits les professeurs de français actuels ont été interrogés à l’époque où eux-mêmes ils étaient candidats à l’E.A.F.
La liste est complétée par quelques souvenirs et témoignages.
Synthèse mise en ligne par Corinne Durand Degranges

Liste des Å“uvres ou des extraits

  ANOUILH, Antigone (cité 2 fois).
  APOLLINAIRE, « Nuits rhénanes ».
  BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, « L’invitation au voyage » (2).
  BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, « La vie antérieure » (2).
  BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, « Ã‰lévation ».
  BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, « L’albatros ».
  BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, « La chevelure ».
  BAUDELAIRE, Petits Poèmes en prose, « Any where out of the world ».
  BAUDELAIRE, Petits poèmes en prose, « le confiteor de l’artiste ».
  BAUDELAIRE, Petits poèmes en prose (titre oublié).
  BERNARDIN de SAINT-PIERRE, Paul et Virginie (3).
  CAMUS, L’Étranger.
  CAMUS, La Peste, « Le bain de l’amitié ».
  DESNOS, « J’ai tant rêvé de toi ».
  DURAS, Moderato Cantabile.
  FLAUBERT, Madame Bovary, le début du roman.
  FLAUBERT, Madame Bovary, la fin du roman.
  HUGO, Les Châtiments, « Stella ».
  HUGO, Les Contemplations, « Demain, dès l’aube ».
  LAFORGUE, « Avant-dernier mot ».
  LARBAUD, « La gare de Cahors » (texte ajouté par le candidat).
  MALLARMÉ, « l’azur ».
  MALLARMÉ, « Le vierge, le vivace ».
  MAUPASSANT, Une vie, la fin du roman.
  MARIVAUX, Le jeu de l’amour et du hasard.
  MOLIÈRE, Dom Juan, IV, 4 : la tirade de Dom Louis.
  MOLIÈRE, Dom Juan, les deux dernières scènes.
  MOLIÈRE, Tartuffe, la tirade où Tartuffe fait la cour à Elmire.
  MONTESQUIEU, Lettres persanes, Lettre 24.
  NERVAL, « El Desdichado » (2).
  NERVAL, Sylvie.
  ORWELL, 1984 (texte ajouté par le candidat).
  PONGE, Le Parti pris des choses, « Le pain » (2).
  RACINE, Andromaque, Acte I, scène 3 ; Acte I, scène 4.
  RACINE, Phèdre, Acte II, scène 5.
  RIMBAUD, « Aube ».
  ROUSSEAU, Les Confessions, la première rencontre avec Mme de Warens.
  SAINT-JOHN PERSE, Amers, « Allez plus doucement, ô pas des heures sur mon toit ».
  SULLY PRUDHOMME, Stances et poèmes, « Le vase où meurt cette verveine... »
  VERLAINE, « Mon rêve familier » (3).
  VERLAINE, « Colloque sentimental » (2).
  VIAN, L’écume des jours.
  VOLTAIRE, Candide, Chapitre III, La guerre « Rien n’était si beau, si leste, si brillant... ».
  VOLTAIRE, Candide, le dernier chapitre.
  VOLTAIRE, Dictionnaire philosophique, article « Guerre ».
  VOLTAIRE, (texte oublié).

Anecdotes et souvenirs :

N°1
  Personnellement, ce fut le poème de Verlaine « Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant... » (Zut ! le titre m’échappe !). Ce dont je me souviens bien en revanche, c’est que l’examinatrice m’a coupé net au bout de 10 minutes d’explication (normal...). Malheureusement, le poème me plaisait bien et je n’en étais qu’à la moitié de ma « prestation »... Depuis, j’ai un peu de mal à donner des conseils sur la gestion du temps au bac et je suis toujours aussi loquace lorsqu’il s’agit de parler d’un poème ! Comme quoi, on ne se refait peut-être pas !!!

N°2
  Il était une fois en 1972... Je me souviens d’avoir choisi à l’écrit un commentaire du poème « Marie » d’Apollinaire avec quelque chose comme « Vous y dansiez petite fille... » plus une histoire de grand-mère et de cloche. J’ai trouvé la cloche et la danse très gaies. Sortie de l’épreuve, un camarade de classe m’annonce avec assurance que la cloche représentait la mort et que le poème était triste... Horreur ! En plus c’était le premier commentaire que je faisais de ma vie. J’étais alors en 1re C (actuellement S) dans une classe hyper chahuteuse. Aucun souvenir de l’oral. Mais j’ai quand même eu 10 à l’écrit et 13 à l’oral. L’année suivante, je m’envolais en A (L aujourd’hui) et pour me permettre de décrocher la mention Bien. Le jury a remonté ma note d’écrit à 11. J’ajoute que j’ai toujours eu une faiblesse frisant le handicap en ce qui concerne l’orthographe... et puis on devient prof de lettres... ainsi va la vie...

N°3
  C’était en 68 ! Voltaire mais je ne saurais dire quel texte ; en fait celui sur lequel je voulais tomber. J’avais préparé ma liste de bouquins (pas de photocopies en ce temps là et je l’avais savamment mis le 3e ou le 4e. Ça a marché. Ma vocation, les bouquins je suis tombée dedans quand j’étais toute petite, mais Voltaire justement j’ai adoré. Mais tu parles du goût pour la matière. Ça ne suffit pas pour enseigner.

N°4
  Baudelaire, Petits Poèmes en prose, « Any where out of the world ». Ah souvenirs, souvenirs... Plus inspiré à l’écrit : un sujet sur la poésie, une citation d’Yves Peyré... Je connaissais alors des passages du Plaisir du texte de Barthes par cÅ“ur, j’avais construit tout mon plan sur « Désir / Plaisir » du texte, je citais aussi L’Espace littéraire de Blanchot (résultat 19/20), le bonheur quoi !! L’année : 1982, comme disait l’autre « Ã§a nous remet loin » (Céline, Voyage au bout de la nuit).

N°5
  « Nuits rhénanes » Apollinaire, hors liste, ah le salaud !

N°6
  Grand souvenir ! J’ai été interrogé sur 1984, de George Orwell, que je présentais librement sur ma liste.

N°7
  C’est un peu loin, mais je crois me souvenir d’un poème de Valéry Larbaud, dont le titre était quelque chose comme « La gare de Cahors », texte que j’avais moi-même, après autorisation de mon prof, ajouté à la liste de la classe (chaque élève pouvait ainsi mettre sur sa liste le texte-support d’un devoir particulièrement réussi).

N°8
  Je suis tombée sur « Colloque sentimental », de Verlaine (texte splendide, extra à étudier).

N°9
  Je vous réponds parce que je suis prof depuis un an, et que cela me fait un peu drôle de participer à la grande noce du bac dans moins d’un mois maintenant, alors que j’étais il n’y a pas si longtemps à la place de ceux que je vais interroger... Je suis tombé sur un extrait de L’Étranger de Camus (étudié en Å“uvre intégrale), celui ou Meursault est interrogé par le juge et répète trois fois (je crois) « cela m’était égal », phrase qui servait de titre à l’extrait.

N°10
  Cela date de 79 j’étais tombé sur « Stella » de Hugo, le poème entier bien sûr et non pas dix ou quinze vers.

N°11
  La fin de Candide en 1977 ! Chaque fois que j’y repense je me dis que je ne savais pas le dixième de ce que j’exige maintenant de mes élèves. On commentait avec des mots ordinaires, quelques solides notions de grammaire, et on ignorait l’existence du verbe « problématiser ». Quels océans d’inconscience !!! Vous n’avez pas demandé la note, alors je ne vous la donnerai pas. Maintenant, cette liste idéale, ce serait plutôt une liste morte, non ? Voudriez-vous l’insérer dans un roman nostalgique ?

N°12
  En... 1973, j’étais tombée sur « L’invitation au voyage » (le poème en vers et non celui en prose), de Baudelaire. Mais c’était au temps du Lagarde et Michard !

N°13
  C’était en juin 81, il faisait chaud, et je suis passée la dernière de la matinée - quand j’y pense aujourd’hui, je comprends qu’au bout de vingt-cinq minutes la petite femme à lunettes m’ait priée de me taire. C’était la dernière page de Madame Bovary, je trouvais le mot « cantharide » poétique pour ses sonorités, la définition que j’avais cherchée dans le dictionnaire pendant les révisions ne m’avait pas ôté cette idée de la tête, et j’aimais cet homme qui meurt d’amour sous la tonnelle, profondément blessée déjà par cette lecture qui disait les erreurs faites et désirées. Voilà.

N°14
  C’était le début de L’Écume des jours. L’examinatrice portait des lunettes noires. Elle interrogeait d’une voix sèche et sévère. Elle a posé des questions sur l’ensemble du roman que nous avions lu intégralement en classe. J’en garde un très bon souvenir. (Je n’ai pas le texte immédiatement sous la main mais je vais le chercher. Cette relecture favorisera la réminiscence). Merci pour cette initiative qui permet d’éveiller un passé endormi.

N°15
  Pour répondre à votre demande, j’ai passé mon bac français en 89 à l’époque où les épreuves comportaient encore deux parties (explication de textes et thème sur l’Å“uvre). J’ai été interrogée sur Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux par un examinateur qui m’a demandé de ne pas faire d’explication de texte mais de traiter le thème « le langage amoureux » à partir d’exemples de l’ensemble de la pièce et de tenir ainsi mes vingt minutes. Cet examinateur devait sans doute contester l’organisation de ces épreuves, comme il a dû être heureux des changements opérés par la suite... Nous le connaissions de réputation car ce n’était pas la première fois qu’il venait faire passer le bac dans ce lycée de l’est parisien, et, enseignant à Henri IV, il avait des exigences que trahissaient des notes assez terribles. Il avait de plus des remarques critiques très dures au moment de l’épreuve et je me souviens encore de la douche froide que prit le candidat qui passait avant moi et qui soutenait l’existence d’un IIIe Empire...

N°16
  C’était en 84 et j’ai été interrogée sur Antigone d’Anouilh (mais quel passage au juste ?) extrait d’un groupement de textes intitulé « Dialogues amoureux dans le théâtre contemporain » (avec La guerre de Troie n’aura pas lieu, Le Malentendu...)

N°17
  Seuls les jeunes profs pourront vous répondre : j’ai passé le bac en 69 avec toutes les matières en terminale et il n’y avait pas d’oral de français ni même autant que je me souvienne de sujets au choix à l’écrit, seulement une dissertation.

N°18
  Et les vieux, vous y avez pensé aux vieux ? J’ai passé mon bac en ...68 ; oui ! Question : que savez-vous de l’Académie Française ? A l’oral ! En cette année bénie (mouais) nous avons tout passé à l’oral (et j’étais timide !).

N°19
  C’était en 1976 (aïe !) et j’ai glosé sur « Demain dès l’aube », de Hugo bien sûr, sans doute brillamment si l’on en croit mon correcteur. Pourtant, c’était l’époque du décorticage minutieux vers à vers ; les axes de lecture n’étaient évoqués qu’en conclusion. Mais les miettes peuvent être plus savoureuses que la portion !

N°20
  Les deux dernières scènes du Dom Juan de Molière en Å“uvre intégrale, un oral très plaisant où j’ai « Ã©bahi » mon examinatrice en proposant de lui faire « même l’explication de l’avant-dernière scène en plus de la dernière »... mais en fait, héhé, cela m’arrangeait car je les avais apprises ensemble et n’aurais sans doute pas pu en dissocier l’étude... plus tard, dans l’entretien, ce gentil jury me pose une question un peu obscure, que faire ? une pirouette ! Je m’aperçois alors fort à propos que je n’avais pas lu de passage... Elle me répond « Tiens c’est vrai » et hop je lis, et hop... oubliée, la question... En bref un bon oral... un bon souvenir, je ne dirais pas la même chose des oraux du Capes...

N°21
  J’ai été interrogée en 1985 par une correctrice en retard d’une heure, de toute évidence de retour de la plage... Je précise que j’ai passé mon bac à Montpellier. J’ai été interrogée sur Moderato Cantabile de Duras. C’est une Å“uvre qui m’avait donné à voir la littérature autrement et que j’ai étudiée plusieurs fois avec mes élèves, du temps où nous pouvions choisir nos Å“uvres intégrales... J’ai eu 16, et ce fut quand même une étape décisive dans mon rapport à la littérature, dont mon métier d’enseignante n’est qu’un aspect de moins en moins pertinent. Mais je suis sur le point de m’égarer...

N°22
  J’ai été interrogé sur « Avant-dernier mot » de Jules Laforgue. Un petit 11 pour sanctionner une prestation sans éclat, alors que maintenant... il y aurait tant à dire !

N°23
  Le sens de l’expression « liste idéale » m’échappe, de même que l’intérêt de la chose... mais peu importe : vous me donnez l’occasion d’évoquer un souvenir... Je suis « tombée » il y a quelque 25 ans sur un extrait de Phèdre (« J’ai langui, j’ai séché dans les feux, dans les larmes ») Si je m’en souviens encore, c’est à cause de la question que m’avait posé ensuite l’examinateur (ou l’examinatrice, cela je l’ai oublié...) : quel rapport on pouvait-on établir entre la pièce et l’époque présente (1970) ; j’avais lamentablement « séché » (moi aussi). Heureusement, il/elle m’a donné la réponse à sa question : c’était l’équivalent-XVIIe de la presse à scandale-XXe... J’en reste encore et toujours ébahie...

N°24
  1971 : Un relent nostalgique et très doux, un peu désuet, comme une senteur qui s’évapore dans le flou des souvenirs, un vrai moment de plaisir, surtout à 15 ans et demi !!
Le vase où meurt cette verveine
D’un coup d’éventail fut fêlé ;
Le coup dut l’effleurer à peine :
Aucun bruit ne l’a révélé.
Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D’une marche invisible et sûre,
En a fait lentement le tour.
Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s’est épuisé ;
Personne encore ne s’en doute,
N’y touchez pas, il est brisé.
Souvent aussi la main qu’on aime,
Effleurant le cour, le meurtrit ;
Puis le cour se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;
Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tous bas
Sa blessure fine et profonde ;
Il est brisé, n’y touchez pas.
Sully Prudhomme, Stances et poèmes

N°25
  Pour allonger votre liste, je ne suis pas tombée mais j’ai carrément chuté sur un texte de Baudelaire dans ses Petits Poèmes en Prose... lequel ? euh, ça je ne m’en souviens pas. Anecdote : à l’entretien, vu le peu d’explication que j’avais données....JE HAISSAIS BAUDELAIRE, ma hantise était évidemment d’être interrogée sur cet auteur...anecdote donc :
l’examinateur (plutôt désagréable au demeurant) me demanda : Quelle orientation choisirez vous après votre baccalauréat ?
moi = la Sorbonne.
Lui = pour envisager quoi ?
Moi = Professeur de français....
Note d’oral = 6...cherchait-il à tuer une vocation ?

N°26
  Ajouter rubrique : je ne me souviens pas. Et je suis même incapable de me rappeler en quoi consistait l’épreuve de lettres que j’ai passée (c’est peut-être les effets de la cinquantaine qui s’approche), curieusement je ne me souviens que de ma disserte de philo. Vous avez dit vocation ? attendant impatiemment le résultat de votre enquête.

N°27
  Quand j’étais en première, en 1964, le sinistre bachotage de la liste de Français n’existait pas. On passait encore l’examen probatoire de fin de première (successeur et quasi équivalent du « premier bac »), avec toutes les matières au programme. Il fallait le réussir pour passer en terminale. On réservait ses efforts de révision pour l’histoire-géo, (pour les maths et la physique, c’était trop tard si l’on n’avait pas bossé toute l’année) et on se gardait bien de considérer le français comme un objet de régurgitations moroses. J’idéalise peut-être, mais je suis sûr que pour moi, le français était une matière où l’on ne travaillait pas vraiment, et qu’on n’aurait jamais eu l’idée ridicule de le réviser. Il y avait une épreuve écrite de français, bien sûr, avec trois sujets. Je sais que je les ai gardés mais je ne les trouve pas aujourd’hui. Je me rappelle que le troisième s’appuyait sur un texte de Hugo. Les autres devaient porter sur des questions littéraires générales. Si je retrouve les sujets, je les envoie. Ce n’était pas extraordinairement difficile. Une culture de bon aloi et une expression agréable y suffisaient. Une mauvaise orthographe était rédhibitoire, mais les faibles étaient éliminés depuis longtemps. Le bac n’était pas encore très démocratique.

N°28
  Pour ma part, ça a été Lettres Persanes lettre 24. Charmant souvenir... Pouah !

N°29
  Je confirme entièrement ; j’ai passé mon bac en 69 ; si le débat se prolonge, j’irai peut-être farfouiller dans mes vieux sujets et brouillons d’examens ; je précise qu’à l’époque, je n’ai pas passé d’oral (bac écrit seulement, excusez-moi d’être déjà un peu vieux, ou plus complètement jeune, malgré mes velléités) ; en tout cas, le bac français était moins technique que maintenant ; il fallait en effet à l’écrit montrer une relative culture, savoir s’exprimer et présenter une réflexion organisée ; c’est ce que je continue à demander à mes élèves - peut-être comme un dinosaure qui refait ce qu’il a fait, certes ; mais, en tous les cas, point n’était besoin de bachoter ! Je chercherai dans mes archives, dans les greniers familiaux ; mais, tant qu’il n’y a pas eu de programme précis en français - donc au-delà du bac, j’ai senti la nécessité de lire beaucoup, et celle de devoir travailler les exercices de commentaire et les autres, dissertations par exemple - mais jamais avec des corrigés tout faits : sans programme, la liste des possibles est tellement longue qu’on ne cherche plus à bachoter, et qu’on travaille !

N°30
  Quand j’ai passé le bac, il devait y avoir une liste je crois mais pas aussi formelle qu’aujourd’hui, pas aussi administrative. Je ne partage pas le souvenir de F.C. (n°29) et je crois que j’avais révisé. Mais surtout je ne garde pas le souvenir de tout ce que je vois de médiocre partout aujourd’hui. Je me souviens que nous avions passé un an entier sur le 20e. On arrivait dans le dernier tome de Lagarde et Michard : Sartre, Camus, etc. avec en plus la philo ça fumait dans les cervelles. Quel élève aujourd’hui a étudié en terminale au moins un de ces auteurs un peu en détail. [...] Je ne vais pas les citer tous cependant Lagarde et Michard n’était pas une encyclopédie mais un manuel de travail. Beaucoup connaissaient beaucoup d’auteurs ; on farfouillait chez Zweig, Hölderlin dans les gros bouquins de Kafka, Joyce, chez les auteurs russes et dans les légendes et traditions du Sénégal par exemple. Et l’on n’était pas très nombreux à ne plus faire de latin. D’ailleurs le latin que j’avais commencé en sixième et abandonné en première, je l’ai repris un an après le bac - études littéraires obligent. Et en prépa je m’étais un peu mis au grec, tout seul, pour approfondir Platon et mieux comprendre Nietzsche. C’est nul de supprimer le latin en L et de saupoudrer avec de l’économie et de l’éducation civique. On avait donc des connaissances assez solides mêmes si chacun ignorait complètement les deux articulations du discours qui sont venues nous empoisonner la vie l’année suivante, sous forme d’une ridicule petite conférence quand j’étais en prépa. Depuis les monstres ont bien engraissé sur le dos des auteurs et les heures se sont réduites comme peau de chagrin. 2 heures en TL, c’est du délire, c’est pas crédible. J’ai lu un article dans un journal de Mexico [...] qui disait à propos de l’anniversaire de la mort de Sartre : un des plus grands écrivains français de notre temps et qui n’est pratiquement plus du tout étudié en France dans les écoles ! Bon, ça résume tout, sous entendu : qu’est-ce ça doit être les autres. Voilà le problème du français et des réformes vus par les étrangers qui s’intéressent à la littérature française. J’avais été interrogé sur La Chute, je sais c’était au programme en TL il n’y a pas longtemps mais ça ne change rien au problème ; j’avais fait un exposé pendant l’année ; la prof., l’examinateur, m’avait donc demandé d’en parler et d’expliquer un passage qu’elle avait choisi elle-même ; on avait bien discuté et cela m’a boosté ma moyenne. J’en avais un petit peu besoin. Et ouf ! je l’ai eu. Tout cela fait un peu pépé avec sa guerre 14, je sais. J’avais un vieil oncle qui radotait aussi déjà à cette époque avec son Verdun et ça nous faisait beaucoup rire ; quand j’ai eu grandi, moins, mais il était mort. Ainsi, donc, ça fait un peu « Allez pépé raconte, hein c’était bien dans c’temps là, hein pépé ...!!! » Eh bien, tant pis ! Désolé d’avoir été si ennuyeux et bonne nuit à tous.

N°31
  Je n’osais pas répondre, croyant que cet appel concernait le « nouveau bac », nouveau pour moi qui l’ai passé en 1958, oui, juste avant qu’on ne commence à le tripoter. Il y avait deux parties, il fallait réussir la première pour passer en ce qui ne s’appelait pas encore Terminale. Toutes les matières avaient le même coefficient, et on devait être « admissible à l’oral ». J’ai le vague souvenir de trois sujets : une « question de cours », genre « Corneille peint les hommes tels qu’ils devraient être, Racine tels qu’ils sont. Qu’en pensez-vous ? », une « explication de textes » qui n’avait pas encore à être composée et consistait à faire une sorte de paraphrase, et une question moins « bateau », qui a été pour moi un sujet sur la description dans le roman. A l’oral, j’ai eu Tartuffe, la tirade où il fait la cour à Elmire si je me souviens bien. Voilà, finalement, est-ce que ça change beaucoup ? Après un certain nombre (un nombre certain !) d’années d’enseignement, je me dis que non, sauf qu’il n’était pas vraiment possible de bachoter, ni d’apprendre (presque) par cÅ“ur la lecture méthodique à trois (3 ! en 10 minutes !) axes que certains candidats (heureusement pas tous !) vont me réciter bientôt. Nous, on était sélectionnés avant, eux le sont après ! Qui est le plus frustré ? Mais si l’on a réussi à donner le goût de la littérature, des belles choses, des beaux écrits, quel bonheur ! Je ne sais pas si le modérateur laissera passer mon message, en tout cas je l’envoie. Signé : Mathulasem(e)

N°32
  J’ai passé le bac de français en 87, et je suis tombée sur « La Chevelure » de Baudelaire, et sur « Les femmes chez Baudelaire » en question d’ensemble. Et j’avais appris mes explications de texte, et les plans des questions d’ensemble. Je pense qu’à l’époque j’aurai été incapable de faire une explication seule. Mais c’est peut-être cette imprégnation des méthodes par le bachotage qui m’a permis de parvenir en fac.

N°33
  Votre approbation me comble d’aise, quoique je sois conscient de la difficulté de revenir en arrière. Je ne sais pas quel pourcentage d’une classe d’âge atteignait le bac en 1964 ou en 1970. Cela devait être fort peu, si je considère que, le brave petit lycée « nationalisé » de garçons d’Épernay où j’étais alors n’ayant pas assez d’élèves en Terminale pour former trois classes (Philo, Sciences ex et Math élem), on avait dû (horresco referens !) y déporter les filles du Lycée de filles, dont on était vertueusement protégé depuis le CP. Cela vous donnait à la terminale un petit parfum sulfureux, érotique et initiatique qu’on n’imagine plus à présent, quand on voit des gamins de dix ans plus audacieux et moins romantiques que nous ne l’étions. Nous voilà au seuil de l’écriture autobiographique... La prochaine fois, nous évoquerons l’enfer de Verdun.

N°34
  Mon expérience du bac..... il y a fort longtemps... en mai 68. Cela devrait rappeler des souvenirs aux plus anciens d’entre nous.... A l’oral, puisqu’il n’y avait qu’un oral à passer, j’ai dû faire l’explication linéaire (à l’époque, on ne pouvait envisager autre chose et le but était d’en dire le plus possible !!!!) d’une scène d’Andromaque de Racine : Acte 1, scène 3 - Par contre, j’avais déjà été interrogée hors liste, puisque cette année là, nous avions étudié avec mon professeur Phèdre de ce même Racine . Mais mon examinateur avait dû juger qu’une littéraire (à l’époque, on était encore des vrais littéraires avec latin et grec.... malgré la montée en puissance des mathématiques qui triompheront dans les années 70) avait assez de culture pour transférer des connaissances d’une Å“uvre sur l’autre. Je ne m’en étais pas trop mal tirée... grâce à l’indulgence bien connue du jury de cette année là.

N°35
  J’espère que je n’arrive pas trop tard pour apporter ma modeste pierre à votre édifice... Très bonne idée d’ailleurs, vraiment ! J’ai passé les oraux de l’E.A.F. en 1989, et j’ai travaillé sur le poème « Allez plus doucement, ô pas des heures sur mon toit » de SAINT JOHN PERSE, dans le recueil Amers, tiré d’un groupement de textes intitulé « Le Sommeil des amants », avec pour question d’ensemble « Le symbolisme du sommeil des amants ».


Ce document constitue une synthèse d’échanges ayant eu lieu sur Profs-L (liste de discussion des professeurs de lettres de lycée) ou en privé, suite à une demande initiale postée sur cette même liste. Cette compilation a été réalisée par la personne dont le nom figure dans ce document. Fourni à titre d’information seulement et pour l’usage personnel du visiteur, ce texte est protégé par la législation en vigueur en matière de droits d’auteur. Toute rediffusion à des fins commerciales ou non est interdite sans autorisation.
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