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Article : [599] - La réforme du lycée


samedi 15 novembre 2008

Par administrateur

Message initial : Comme les infos sont très floues, quelqu’un sait-il quelque chose de précis ?
  si j’ai bien compris nous perdons l’heure de module et d’AI en Français. Cela signifie-t-il qu’à service plein nous allons nous retrouver avec 5
classes ? Je m’interroge sur ma capacité à faire des devoir type bac tous
les 15 jours comme conseillé par nos IPR en 1re (et un par trimestre en
2de)... Je n’y arrive même pas avec seulement 4 classes à 34 élèves !
Ce que j’entends laisse croire qu’il va falloir changer notre
façon d’évaluer ? oui ? non ?
  une collègue de lettre classique (je les croyais déjà - comme les Poilus -
tous morts... ) se demandait l’autre jour, ce qu’elle allait pouvoir faire
lorsque ses latinistes seraient partis vers d’autres options au second
semestre....
  comment vos établissements envisagent-ils les options qu’ils vont proposer à
la rentrée ?
  que faisons-nous pour l’orientation des futurs seconde ? (puisque ils vont
déjà choisir des spécialités)
  que deviens la filière L ?

*

  Le dossier de presse du ministère

  Le tableau des horaires d’enseignement prévus, sur le site du ministère

*

  Des sources syndicales indiquaient que les horaires de français resteraient les mêmes soit 4 heures élèves avec apparemment 1 heure dédoublé qui serait le moduel. L’heure d’aide devanant obligatoire pour tous à travers le soutien de 3 heures dont le français pourrait bénéficier.
PS : 1 devoir type abc tous les 15 jours en première ???? Quand je réussis à tenir un rythme tous les 3 ou 4 semaines c’est un miracle... et les élèves ne cessent de se plaindre du travail qu’ils ont !

*

  Pour s’informer, il y a la presse et les documents syndicaux [NDLR : Réaction du SNES, du SGEN-Cfdt et de SUD] et le Café pédagogique, par exemple. Reste que le flou domine sur tout (contenu, organisation, horaires...) pour l’instant. C’est en décembre, me semble-t-il, que le ministre en dira davantage. On ne peut donc pour le moment envisager quoi que ce soit....

*

La semi-obscurité dans laquelle nous sommes laissés est la même pour tous. Les informations étant délivrées au compte-goutte, voici pour l’instant ce que nous savons (et les hypothèses qui vont avec...)
  le français demeure dans le bloc d’enseignement général, lequel comporte 7 disciplines pour un total de 21 heures. Mais nous ignorons encore quelle quotité horaire sera attribuée à chaque discipline. Ce qui peut nous laisser
craindre qu’il n’y ait plus que 3 heures de français. A signaler de plus qu’il n’est nulle part fait mention d’éventuels dédoublements dans quelque discipline que ce soit...

  MAIS dans le cadre des modules complémentaires de 3 heures semestrielles surgit dans le groupe des "humanités" un module de "littérature" (figurent aussi dans ce groupe les langues anciennes), ce qui peut laisser craindre que les élèves aient tous 3 heures de "langue" et que seulement ceux choisissant le module aient accès pendant 3 heures à la "littérature".

  Enfin, les élèves auront un accompagnement obligatoire de 3 heures hebdomadaires mais nous ignorons qui sera "l’accompagnant" : CAE, enseignant (auquel cas cela pourrait remplacer l’AI et éventuellement les modules), ou
animateur extérieur à l’établissement (personnellement, je me dis que la réforme du recrutement des enseignants permettra de recruter pour ces heures les étudiants titulaires du master 2 d’enseignement n’ayant pas été reçus au concours, mais ce n’est qu’une supputation totalement subjective) ?

  De plus, l’année scolaire sera semestrialisée et comportera 4 conseils de classe (un à chaque milieu et fin de semestre) ce qui accroît les réunions (mais peut-être l’ISOE sera-t-elle revalorisée ?)

  Dernière incertitude (enfin, il y en a d’autres, mais je m’en tiens à celles concernant notre discipline) : comment les élèves choisiront-ils leurs modules ? si un élève choisit le module de littérature au 1er semestre, pourra-t-il le reprendre au second trimestre ? ce qui suppose que l’enseignant ne fasse pas la même chose et tient compte des acquis du premier semestre. Si un élève choisit le module de littérature au second semestre, aura-t-il accès à un module "pour débutants" ou devra-t-il suivre le même cours que ceux qui auront pris ce module au premier semestre ? Que fera l’enseignant sans élèves au second semestre que vous évoquez ?

  Pour la rentrée prochaine, nous ne savons pas quel programme nous aurons à enseigner puisque nous ne savons même pas le nombre d’heures de cours que nous aurons...

  En ce qui concerne "le cycle terminal", ainsi nouvellement nommé (c’est-à-dire les classes de 1re et de terminale) la réforme les concernant n’est absolument pas encore évoquée, ce qui pose problème dans le fait
d’envisager les années du lycée comme un tout, avec une progression.
Peut-être pourrions-nous espérer qu’il y ait encore du français en terminale, mais cela ne semble guère envisageable dans l’immédiat.

  je crains fort que le nombre de nos classes n’augmente considérablement, ce qui limitera effectivement nos capacités de correction, à moins que, comme aux Etats-Unis, on ne nous demande de mettre en place des QCM... A priori, nos IPR ne sont même pas consultés alors tout est envisageable !

Sur le site du MEN une présentation (certes bien vague) a été faite par notre ministre, et dans la rubrique "actualités" figurent différentes informations.

*

  Pour ce qui est des « réactions pédagogiques » que vous réclamez, il est difficile de réagir quand on ne sait pas de quoi il sera question exactement... Une colistière vous a fort clairement exposé la situation...
Les programmes sont annoncés pour le 15 Décembre, et on se demande bien sur quelles bases ils seront faits, puisque la répartition horaire par discipline dans le tronc commun n’est pas encore arrêtée...
Dans les établissements, les chefs sont encore moins informés que les enseignants, et pour ce qui concerne le mien, aucune modification n’est encore engagée évidemment... C’est bien un vrai problème pour l’orientation des élèves de 3e...

La filière L correspond à mon avis à la « famille » Humanités, avec encore moins de possibilités (pas d’option maths, par ex.) ; pas de possibilité de cumuler le module Littérature française et langues anciennes sur chaque semestre... (cf. tableau du ministère) : c’est donc une offre réductrice par rapport à l’offre actuelle, indépendamment même des questions d’horaires disciplinaires.

Quelques commentaires qui n’engagent que moi :

En voyant le tableau ministériel, j’ai constaté qu’un contenu identifié comme « littérature française » n’apparaissait que dans la famille « humanités », en concurrence sur chaque semestre, avec les langues anciennes, les langues vivantes, les arts...
Concluez vous-même : dans ces conditions, quelle proportion d’élèves prendront ce module en 2de, au vu des effectifs actuels des séries littéraires, et de leur orientation souvent tournée vers les langues vivantes ??

Le contenu relatif à notre discipline dans le tronc commun s’intitule « français » : il se distingue donc a priori de celui intitulé « littérature française » ; et comme il s’agit d’un tronc commun destiné à assurer des bases communes, je suppose qu’il sera centré sur les techniques d’expression : lire, écrire, parler (il y a des préconisations de l’AFEF allant dans ce sens).
Bien sûr, c’est utile et nécessaire de renforcer ce qui n’est désormais plus acquis à l’issue du collège, malgré tout le travail de nos collègues...
Mais ce qu’il faut bien voir, c’est que cela évacue du tronc commun , LA CULTURE LITTERAIRE, qui sera réservée à une toute petite frange des élèves déjà intéressés par les Lettres... : où est l’exploration ? où est l’idée de transmission d’une culture commune ? Quelles possibilités de changements de parcours ?

Ces remarques valent pour d’autres matières : histoire-géo, par exemple, qui sera réservée en modules à la famille « sciences de la société ».

Le plus grave à mes yeux, est que cette réforme signe l’arrêt de mort de la volonté de donner à la population une CULTURE GENERALE , HUMANISTE, formatrice de l’esprit critique , outil indispensable pour connaître, analyser le monde et pouvoir agir sur lui. Pourquoi la série S séduit-elle tant d’élèves et de familles ? Parce que paradoxalement, c’est la plus équilibrée en enseignements scientifiques littéraires et de sciences humaines : elle ouvre donc toutes les possibilités d’orientation future...

Cet équilibre et cette variété disparaissent de la réforme envisagée, car il ne faut pas oublier que la réforme Darcos se situe dans un contexte de suppressions massives de postes (13500 pour cette année, en plus des 11000 de l’an dernier), et de contraintes budgétaires.

Alors plutôt que m’y préparer, je préfère agir pour l’empêcher de se réaliser telle quelle.

*

  Je ne souhaite pas faire l’avocat du diable mais simplement exprimer certaines interrogations personnelles. Puisse ma réflexion rester dans le domaine pédagogique.

J’entends certains se demander ce que va devenir la filière L du fait du jeu des options et du probable désintérêt des élèves pour la littérature.

Dans un lycée comme celui dans lequel j’enseigne (à dominante technique) la filière L, comme peau de chagrin, a quasiment disparu. Elle ne rassemble qu’une vingtaine d’élèves en première comme en terminale, et la moitié d’entre eux, recrutés en fonction de leurs compétences en langues étrangères, ne savent pas bien (l’un expliquant sans doute l’autre...) former leurs phrases en français. En revanche, je vois des élèves des séries technologiques ou scientifiques fort intéressés par la littérature, et privés du moindre approfondissement en raison des lacunes et du désintérêt militant de leurs camarades. Peut-être pourrait-on rassembler ces élèves motivés mais épars, dans des groupes à option commune ? Peut-être aurions-nous alors davantage d’élèves en lettres que dans le système actuel.

Autre réflexion. L’élève moyen de seconde indifférenciée, issu du collège unique et d’un milieu peu cultivé littérairement, ayant reçu, dans sa famille comme à l’école, une notion très exécutrice et répétitive du travail, sans pour autant posséder les savoir-faire linguistiques et mathématiques fondamentaux (lire, écrire, compter) que l’on possédait autrefois (généralement..) en fin de cours complémentaire, cet élève-là est-il capable de suivre avec profit trente heures de cours par semaine suivies de vingt heures de travail personnel ? La réponse me semble négative. Ne pourrait-on pas alors faire moins de choses mais mieux ? Et au lieu de survoler des « objets d’études » renouer avec le plaisir des Å“uvres, avec des enfants un peu plus motivés et un peu plus détendus ?

Bref, tout ne me semble pas mauvais dans cette réforme, hormis la précipitation et le manque d’information des enseignants.

Mais peut-être suis-je un rêveur, qui ne veut pas voir que le cours de français dans une seconde à dominante technique doit servir, comme le dit un hiérarque, « Ã  savoir écrire pour plus tard pouvoir produire des CV » ?

*

  Mes réflexions du moment, avec la réserve induite par le peu de précision des informations actuelles, me conduisent à aller dans ce sens également. La série L actuelle concerne très peu aujourd’hui des élèves réellement "littéraires", c’est-à-dire ouverts sur le monde, curieux, lecteurs, spectateurs, auditeurs, "visiteurs", intéressés par les humanités, etc. et on trouve en effet dans toutes les sections des élèves ayant ce profil, je pense donc que des cours de littérature rassemblant des élèves de toutes sections (même si l’on parle pour le moment seulement de la seconde) peuvent être absolument passionnants.

Je pense aussi qu’avec un peu de bon sens on ne doit pas craindre que l’enseignement de la langue, actuellement totalement (ou, disons, presque) absent des quatre heures en classe entière que nous avons en seconde (l’heure de module étant souvent, du moins dans mon cas, une heure de méthode et de langue), occupe les trois heures de cours du tronc commun. Et comme le fait très justement remarquer un(e) colistie(/è)r(e), on parle bien de la 6e à la première de cours de "français", et l’on fait pourtant de la littérature dès la 6e (et même avant) !

Enfin concernant l’esprit de cette réforme, je pense qu’elle contribue à faire évoluer un vieux mal français que beaucoup d’entre nous déplorons : la segmentation du savoir. Peut-être les élèves arriveront-ils à ne plus être seulement des "littéraires", des "scientifiques", des "économistes", etc. Peut-être permettra-t-elle plus de curiosité et d’ouverture d’esprit.
Bien sûr il faut pour cela un tronc commun qui ne soit pas au rabais, et notre vigilance doit ici s’exercer. Elle a déjà permis que les sciences expérimentales y soient réintégrées. Il comprend donc aujourd’hui le français, les mathématiques, l’histoire-géographie (contrairement à ce qui a été dit ici), les sciences expérimentales, deux langues vivantes, et l’éducation physique et sportive. On peut toujours trouver qu’il y manque quelque chose, mais ce n’est déjà pas mal. Et franchement, quand je vois parfois la complexité (et l’inanité...) de certaines notions, notamment techniques, que l’on doit enseigner au lycée en français, quand je vois la complexité des cours de SVT et de SPC que des élèves de seconde doivent ingurgiter avant de passer en ES, L, STG, etc., je me dis qu’un tronc commun plus digeste et recentré sur l’essentiel (mais, je sais, qu’est l’essentiel ?) n’est pas une mauvaise idée.

*

  Voilà quelques réponses à vos questions, dans la mesure de mes moyens.
Nous aurons tous un certain nombre de modules de 3 heures/semaine. Selon nos situations, 3X5= 15 heures ou 3X6 = 18 heures.
Donc, se préparer à avoir au moins cinq "groupes" d’élèves.
Qu’enseigner ? Les programmes vont être élaborés à partir de janvier. Mais on sait que chaque élève doit suivre un module de français obligatoire (enseignement général : 7 modules dont celui-ci) + 2 modules d’exploration, parmi lesquels "humanités" (= littérature française, latin & grec, LV ou LCR, arts & histoire de l’art) + un module "accompagnement personnalisé" obligatoire, qui peut consister en : remise à niveau, travaux interdisciplinaires, travail d’expertise ou aide à l’orientation.
Le choix est donc à faire pour nous : dans quel module se placer pour compléter les modules d’enseignement général ?
Les travaux interdisciplinaires sont à exploiter, comme les "travaux d’expertise". Il y aura, bien sûr, des modules de remise à niveau dés le premier semestre : les doublants n’existeront plus, mais les élèves seront bien là.
Le nombre d’élèves par groupe-module n’est pas déterminé. Peut-être sera-ce un des points d’autonomie laissée à chaque établissement. Pour l’instant, on l’ignore.
L’évaluation sera différente, en raison de la nécessaire modification des groupes et emplois du temps au second semestre.
Il faudra une évaluation normative avant Noël. Donc, des méthodes rapides et efficaces. Mais cela, nous connaissons...
Les devoirs "type bac" en seconde n’auront pas lieu d’être, puisque le bac ne sera défini qu’en 2009-2010.
La filière L n’est en danger que géographiquement. Dans l’absolu, et dans les établissements suffisamment pourvus de modules divers, un élève de seconde peut très bien (j’ai projeté, ça marche) se spécialiser en lettres et littérature et en faire, toutes matières confondues, 9 heures par semaine.
Donc, pour orienter les élèves de troisième actuels, il faut leur expliquer qu’ils doivent vraiment réfléchir à leur "seconde idéale", puis vérifier si le lycée où ils vont le leur permet. Ensuite, qu’ils avisent.
Et c’est là que je vous rejoins : comment nos établissements envisagent-ils les modules qu’ils vont proposer ?
Eh bien, dans mon lycée, il ne se dit rien. Personne ne nous a parlé officiellement de cette réforme. Je suis fort perplexe. Mon proviseur, ce soir, lors d’un conseil de classe, parle de doublement. Je demande vers quels modules, pas de réponse, on passe. Est-ce que notre administration directe a eu des précisions qui la rassurent, ou ignore-t-elle les modifications ?
Car nous pouvons proposer ou demander tous les modules du monde, avec projets spéciaux ou pas, il faudra toujours faire avec les locaux et les moyens actuels.
J’en conclus qu’il faut se préparer à travailler autrement, et donc, anticiper : recyclons nos séquences ! Mais aussi, demandons à ceux qui savent.


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