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mercredi 11 août 2004
Par Christian Raseta
Il s’agissait de comprendre la différence entre la « lecture méthodique » des anciens programmes et l’actuelle « lecture analytique ». Quelques mots d’introduction : la question est polémique. Plusieurs réponses affirment que le changement n’est que terminologique, et qu’il n’y a nulle différence entre lecture méthodique et analytique (I) ; car c’est à la lecture cursive que la lecture analytique s’oppose en réalité (II). Le débat conduit finalement à une réflexion sur différentes pratiques pédagogiques (III). Synthèse mise en ligne par Valentine Dussert.
I. Les dérives, causes du changement de terminologie
► Toutes les réponses s’accordent sur la cause du changement de terminologie : les dérives de la méthode précédente.
— La lecture méthodique a d’abord remplacé l’explication de textes, jugée prétentieuse car trop magistrale, et souvent linéaire donc parfois morcelée.
— La lecture analytique a ensuite remplacé la lecture méthodique, jugée trop systématique, techniciste, jargonnante, formaliste... car elle avait tendance à utiliser des « grilles de lecture » préétablies...
► Néanmoins, les réponses s’accordent aussi sur le fait qu’une « vraie » ou une « bonne » explication de textes est tout aussi valable (aboutissant d’ailleurs au même résultat avec les mêmes démarches) qu’une « vraie » ou « bonne » lecture méthodique ou analytique...
— En effet la lecture analytique est censée corriger les dérives de la lecture méthodique en introduisant la notion de problématique, d’hypothèse de lecture, qui préside à l’étude du texte (qu’elle soit confirmée ou infirmée). Mais la « lecture méthodique » était auparavant définie comme une « lecture consciente de ses démarches et de ses choix ». Plusieurs réponses remarquent que la différence n’est pas évidente !
— Certains observent déjà les dérives possibles de la lecture analytique (proposer une lecture trop libre à partir d’un choix subjectif), et notent avec une certaine ironie qu’elle ne manquera pas d’être remplacée elle aussi par une autre « formule »...
II. La véritable opposition : entre lecture analytique et lecture cursive
► Pour certains, la lecture analytique est une démarche (formuler des hypothèses de sens et les confronter au texte, ne pas chercher à « tout dire »), qui peut s’appliquer à l’analyse d’un extrait ou d’une Å“uvre intégrale, et qui donc ne s’oppose pas à la lecture méthodique (elle aussi fondée sur le questionnement), mais à la lecture cursive.
► Un passage des accompagnements des programmes confirme cette analyse : la lecture analytique « a pour but l’examen méthodique des textes et constitue un travail d’observation des éléments constitutifs de ceux-ci, suivi d’un travail d’interprétation. Elle permet aux élèves de s’approprier progressivement les perspectives d’études et de distinguer celles qui sont les plus pertinentes selon les textes étudiés. La lecture analytique est une démarche, c’est-à -dire qu’elle peut se réaliser sous la forme d’exercices divers : aussi bien ceux qui ont pu s’appeler précédemment explication ou lecture méthodique que l’étude d’oeuvres intégrales. »
III. D’autres questions soulevées au cours du débat
► Le « problème » de la lecture linéaire : l’instauration de la lecture méthodique a parfois été comprise comme une réaction contre l’analyse linéaire des textes, alors que la lecture analytique aurait pour but aujourd’hui d’autoriser de nouveau cette démarche.
— Certains font remarquer que, même du temps de la lecture méthodique, l’analyse linéaire n’était nullement proscrite.
— D’autre part, tous ne sont pas d’accord sur les vertus de l’explication linéaire (à mettre en Å“uvre bien sûr lorsque le texte s’y prête) : pour certains, elle court le risque du morcellement et ne constitue qu’un travail préparatoire, inacceptable désormais à l’écrit. Pour d’autres, elle permet au contraire, lorsqu’elle est soutenue par une problématique solide, une analyse plus fine et plus subtile, et un examen plus minutieux de l’hypothèse initiale.
► La question des « grilles de lecture », que l’on pourrait croire également proscrites du fait de la suppression de la lecture méthodique.
— Toutes les réponses s’accordent sur l’importance de la participation active des élèves à l’élaboration du sens, que l’explication de texte magistrale interdisait parfois. Les grilles de lecture à cette égard présentent à la fois un avantage (elles permettent aux élèves d’être autonomes) et un inconvénient (les élèves peuvent les utiliser mécaniquement).
— Ainsi, si la dérive de la lecture méthodique formaliste et techniciste est regrettable, les « grilles de lecture » peuvent être utiles et fécondes, lorsqu’elles ne sont pas utilisées de manière systématique et n’évacuent pas le sens, mais aident à construire l’hypothèse de lecture, et lorsque l’on accepte d’abandonner en fin de travail des analyses qui s’avèrent inutiles.
► La distinction entre travail de préparation et « produit fini » : plusieurs réponses estiment qu’elle est essentielle.
— La confusion est peut-être due au terme « lecture », qui peut désigner aussi bien l’action de lire que le résultat de cette lecture (interprétation).
— Encore un point commun relevé entre lecture méthodique et lecture analytique : elles procèdent toutes deux d’un travail de réception (nous sommes dans l’ère de la critique de la réception, et non plus de la genèse comme pour l’explication de texte plus magistrale). Cette lecture, ce travail de réception précèdent la mise en forme (par exemple sous la forme d’un commentaire, composé ou non, ou encore d’une explication orale...) - cette dernière étape ne s’effectuant pas systématiquement en classe, mais relevant plutôt du travail individuel de l’élève, qui comprend l’importance de son implication, notamment en 1re, puisqu’il sera évalué sur une prestation personnelle à l’écrit comme à l’oral.
En guise de conclusion...
Le débat était complexe, mais on peut citer pour finir un passage tiré d’une des réponses, qui mettra d’accord tous les participants : « L’essentiel est que les élèves deviennent grâce à nos réflexions et nos contradictions des lecteurs avisés et si possible intéressés »...
Avec la participation de : Ange, Anne-Marie, Marie Hélène Antoine, Valentine Dussert, Jeg, Josiane, Philippe Joussain, Patricia Larrue-Mary, Philippe Misandeau, Christophe Ortoli, Dimitri Roger, et bien d’autres...
Ce document correspond à la synthèse de contributions de collègues professeurs de lettres échangées sur la liste de discussion Profs-L ou en privé, suite à une demande initiale postée sur cette même liste. Cette compilation a été réalisée par la personne dont le nom figure dans ce document. Ce texte est protégé par la législation en vigueur. Fourni à titre d’information seulement et pour l’usage personnel du visiteur, il est protégé par les droits d’auteur en vigueur. Toute rediffusion à des fins commerciales ou non est interdite sans autorisation.
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