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Article : [446] - Organiser un concours de poésie


samedi 31 décembre 2005

Par Sylvie Arras

Il s’agissait de partager les expériences sur la façon d’organiser un concours interne de poésie : les contraintes d’écriture, l’organisation du jury, les récompenses.
Synthèse mise en ligne par Catherine Briat.

Vos avis :

  J’ai fait cela pendant plus de 10 ans dans mon établissement mais j’arrête cette année parce que la lassitude est apparue des deux côtés.

  J’organise tous les ans dans mon lycée une session interne du concours "Des mots pour voir" : les élèves participent au concours international mais nous faisons un palmarès spécial pour le lycée avec des prix offerts par FSE.

  Nous pratiquons depuis plusieurs années un concours de poésie interne à notre lycée technique et professionnel.

  Je viens d’essayer cette année, et ce fut un franc succès. Les collègues organisateurs ont poursuivi différents objectifs : faire écrire les élèves (il s’agit d’une part de valoriser ceux qui écrivent déjà, en les incitant par ce cadre « institutionnel » du concours, et d’autre part d’encourager ceux qui n’écrivent pas par un sujet moins scolaire, afin de dédramatiser le côté « sacro-saint » d’une poésie qui serait inaccessible au commun des mortels) et faire vivre le CDI.

Les contraintes d’écriture :

  Il s’agissait d’un concours de textes à forme libre (nouvelles, poèmes, critiques...). Je n’imposais pas de thème mais une longueur maximum (une page, 2 pour les nouvelles) et un nombre de textes par élèves maximum aussi (pour éviter les 35 poèmes d’amour de la même élève qui tous les soirs écrit en s’évertuant de faire rimer « amour » avec « toujours »).

  Nous choisissons habituellement trois thèmes avec ou sans contraintes formelles.
Exemples de thèmes choisis ces dernières années : les thèmes croisés comme l’adolescence et la révolte, l’amitié et la richesse, la rue, la cité ou l’amour et les mots ; les thèmes uniques comme l’espoir ou la fête.
Nous essayons d’ouvrir un peu les perspectives de façon à éviter de tomber dans le très banal « amour-toujours » Mais l’expérience prouve que l’amour est incontournable.

  Pour limiter les pompes sur Internet, nous avons concocté un sujet tordu mais ludique :
« Vous êtes libre de rédiger votre poème en vers, en vers libres (libre retour à la ligne, rimes facultatives), ou en prose.
Votre poème inclura obligatoirement une (et une seule) des expressions suivantes au choix, tirées de poèmes du XX ème siècle :
« Le coquillage disait à la mer ... » (Robert Desnos, « Chant du ciel »)
« Donnez-moi de quoi changer les pierres... » (Jean-Pierre Duprey, « Saveur d’homme »)
« Longtemps ce fut l’été... » (Blaise Cendrars)
« C’est idiot quand tous les astrologues cambriolent les étoiles... » (Blaise Cendrars)
Vous placerez cette phrase à l’endroit de votre choix dans votre poème. »

Organisation du jury :

  Dans la mesure du possible, le jury était mixte : des élèves non participants et des collègues qui n’enseignaient pas le français (nous avons une vision quand même assez déformée !) ; les textes anonymes leur étaient remis avec une grille de vote qui reprenaient diverses catégories (forme et âge).
C’était toujours un concours d’écriture puisque tous les genres étaient permis ; les élèves fournissaient spontanément les textes ou des collègues proposaient de bons travaux. Toutefois, compte tenu de la composition du jury, ce n’était pas nécessairement les travaux les mieux cotés au cours qui remportaient le concours et c’était très valorisant pour des élèves relativement faibles en classe.
Ce qui est très sympathique c’est que le jury est constitué de personnels du lycée de différents horizons (profs d’autres matières que le français, secrétaires, agents etc.) avec quelques élèves. Notre jury est en général au nombre de 15 à 20 personnes.

  La constitution du jury nous pose surtout des problèmes pratiques. En ce qui concerne les élèves, on demande des jurés, au moment du lancement du concours. Les jeunes sont alors très enthousiastes à l’idée d’avoir ce pouvoir de décision, pour ma part je relève alors les noms des volontaires. Mais ce bel enthousiasme pâlit au moment où il faut assister aux réunions. Je lance des invitations pour les autres jurés et on voit ce que l’on peut faire matériellement. Nous avons pris l’habitude de demander deux exemplaires de chaque poème au concours. A la première réunion du jury nous anonymons un exemplaire de chaque texte et constituons des enveloppes qui circulent entre les membres du jury de façon à ce que chacun évalue les textes selon des modalités établies entre nous.
Lors du jury décisif, nous avons déjà une préselection des « meilleurs » textes qui nous permet de présenter les poèmes qui sortent du lot pour établir notre palmarès en commun.

  A la clôture du concours, nous constituons un jury le plus mixte possible ( intervenants, divers personnels, élèves mais on a du mal à les retenir hors du strict temps scolaire... et profs de français surtout). Pour terminer, il y a une fête avec remise des récompenses et pot.
Cette tradition est bien ancrée et bien perçue au lycée ...

  Les membres du jury étaient les suivants : 6 élèves (1 première L, 2 secondes générales, 1 première STT, 2 bac pro). Ils avaient étaient choisis par leur prof de français, pour prendre des élèves motivés et compétents. 5 adultes (trois profs de français dont un du professionnel, 1 prof de maths, un agent administratif). Le concours était conçu comme un élément fédérateur entre les différentes voies du lycée, et nous souhaitions que cela se traduise dans la composition du jury. Nous avons obtenu 51 poèmes. C’était trop pour le Jury. Nous avons donc organisé une phase de présélection : les poèmes anonymés étaient affichés, et les élèves du lycée pouvaient voter au CDI (après signature sur une liste d’émargement). (Ce système donne assurément de la vie au lycée, mais les poèmes sélectionnés ne sont pas les meilleurs sur le plan du travail de l’écriture. L’an prochain, nous allons changer de système. )
Il reste donc 20 poèmes en lice ! Les membres du jury doivent les lire à domicile, et classer les 10 qu’ils préfèrent. Ensuite, chaque membre présente son poème préféré. Ce qui revient à sélectionner 10 poèmes. On examine ensuite chaque poème, le débat est riche et animé ! Enfin, on vote à bulletin secret. La convocation des membres du jury est simplifiée si le proviseur accepte que le jury se tienne sur des heures de cours (prévoir 2 heures consécutives). Les élèves et collègues concernés sont donc libérés de cours.

Récompenses :

  Pour les récompenses, je faisais appel aux maisons d’édition (la 1ère fois ça marche, après beaucoup moins), aux libraires qui ont toujours en stock des cadeaux de reste des promos d’éditeur (vous savez cette petites choses qu’ils offrent l’été à l’achat de deux ou trois exemplaires), à la bibliothèque locale qui a souvent un petit budget, au centre culturel qui m’offrait généralement deux abonnements « jeunes » pour la saison suivante. Je gardais en réserve également les bouquins que j’avais lus et ne souhaitais pas conserver et des collègues en apportaient aussi. Mais la plus grande motivation pour eux était la publication de leurs textes : je fabriquais une petite brochure, mise en vente avec l’aide et au profit de l’amicale de l’établissement et toujours très vite épuisée (c’est la partie la plus lourde du travail).

  Pour ma part le soutien de la gestionnaire du lycée est capital car elle cadre tous les soucis de dépenses et d’organisation matérielle qui constituent le socle de la matérialité du projet. Le concours des documentalistes,de profs d’arts plastiques pour les affiches est également précieux.( La région nous accorde aussi quelques heures sup à répartir entre les collègues impliqués, mais cette année nous ne serons pas très riches)

  Le financement vient en grande partie d’une action Permis de réussir octroyé par la région.Notre concours est ouvert à tous : élèves, profs, et personnels. Il est récompensé par des beaux livres( de poésie), une plaquette des poèmes primés et des gros lots : 3 voyages ( à prix modiques )offerts par notre Maison des Lycéens.Les gros lots sont évidemment réservés aux élèves

  Avec la complicité d’un libraire de la ville nous offrons des bons d’achat de livres et des CD-Rom. Ce qui motive aussi beaucoupo les élèves c’est que leurs textes sont édités d’abord sur image imaginaire puis, pour les meilleurs, dans le catalogue du concours. Même si vous ne pouvez confier une édition à un imprimeur, il est souhaitable d’éditer les textes sur un site.
Vous pouvez avoir un aperçu de cette expérience sur eduscol.

  Nous avons négocié des prix avec la maison des lycées : des bons d’achats FNAC de 50, 40 et 30 euros pour les premiers, et des BD d’une valeur de 20 euros pour les trois suivants. L’adjoint au maire s’est rattaché à l’opération (discours lors du pot de clôture), et a apporté des prix supplémentaires pour les trois premiers. L’année prochaine, nous allons nous rattacher à l’opération « printemps des poètes » de la mairie, pour avoir un soutien plus conséquent.

Organisation :

  Entre le moment où nous ouvrons le concours par affichage dans le lycée et sa clôture, il se déroule 4 à 5 semaines, nous procédons à l’envers pour établir un calendrier à partir de la date de remise des prix sachant que le gros travail c’est la saisie, la mise en page et la confection de la plaquette ; pour ma petite santé, il vaut mieux éviter que ce travail ne corresponde à une période d’intenses corrections programmées...

  Pour lancer le concours nous avons recours, selon nos finances, à des intervenants extérieurs qui proposent des ateliers ( écriture ou lecture, spectacle poétique... )surtout à destination des secondes.

  Il faut soigner l’affichage, et faire présenter le concours dans les classe par différents professeurs, en le rappelant plusieurs fois. Une semaine avant la clôture, on fait une nouvelle série d’affiches.

Un exemple concret d’organisation :

Toutes les classe de seconde écrivent une nouvelle (après avoir étudié ce genre en classe) dans le cadre du module.

1er module : mise en place du sujet, analyse des contraintes du sujet (nous imposons la 1e phrase qui est choisie au hasard dans leur manuel par l’équipe des profs au début de l’année et 2 pages dactylographiées), mise en écriture.
L’année dernière la 1e phrase était « je mets un tableau sur un mur » et cette année « le secret est d’abord de plaire et de toucher » le hasard a choisi en effet Boileau...

2e module (15 jours plus tard) : séance au CDI ils apportent un brouillon qu’ils doivent retravailler. Cette phase les oblige à retravailler leur production et à ne pas le faire la veille pour le lendemain. Ils sont au CDI pour utiliser les dictionnaires et les informations (caractère documentaire de la nouvelle).

3e module : Lecture, les élèves lisent leur nouvelle dans le module. Les autres ont une grille d’analyse et prennent des notes. A la fin, un vote s’effectue dans le module de la meilleure nouvelle.

Puis en classe entière, nous lisons les 2 nouvelles (celles qui ont gagné dans chacun des modules) et nous en choisissons une.

Il y a donc 10 nouvelles élues dans les 10 classes de 2nd qui participent à la phase finale. Ces élèves ont déjà gagné au moins un bon FNAC de 10 €. (nous voulions une place de ciné mais cela n’a pas été possible).

Chaque classe élit un élève (parmi des volontaires) qui sera membre du jury d’évaluation finale. Ce jury est constitué des 10 élèves, des profs de français de 2nd ainsi que de quelques profs d’autres matières ayant envie de participer. Nous faisons des photocopies, nous lisons les nouvelles chez nous et nous nous réunissons un soir pour un vote qui élit les 3 meilleures nouvelles. Les 3 prix sont alors des bons FNAC 150 € pour le gagnant, 100€ pour le 2nd et 50 € pour le 3e. Nous avons réussi à obtenir cela de notre économe après une longue lutte et avec l’aide des parents d’élèves (mais je suis dans le privé, je ne sais pas comment cela marche dans le public, de toutes les façons nous avons 350 élèves en seconde, si chacun donnait 1€ nous avions presque notre compte). Les nouvelles gagnantes sont publiées dans le journal du lycée et affichées dans la cour. Il y a une remise des prix très solennelle avec le directeur.

Avec de pareils prix, les élèves sont très mobilisés... mais ils apprécient aussi beaucoup ce travail.

Pour avoir déjà fait écrire des poèmes à mes élèves j’imposerais des contraintes formelle (qui rendent le travail plus facile contrairement à ce que l’on pourrait croire) : soit le sonnet, soit une longueur de vers et une longueur de strophes et un nombre de strophes, et puis, pourquoi pas comme nous, le 1er vers ?


Ce document constitue une synthèse d’échanges ayant eu lieu sur
Profs-L (liste de discussion des
professeurs de lettres de lycée) ou en privé, suite à une demande initiale
postée sur cette même liste. Cette compilation a été réalisée par la
personne dont le nom figure dans ce document. Fourni à titre d’information
seulement et pour l’usage personnel du visiteur, ce texte est protégé par la
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